Depuis plus de dix ans, les entreprises investissent massivement dans la Marketing Tech (ou Martech) afin de mieux cibler leurs clients, automatiser leurs campagnes et optimiser leurs performances. Pourtant, une étude récente de la Harvard Business Review met en lumière un constat inquiétant : la plupart de ces investissements n’apportent pas les résultats attendus. Les directions marketing se retrouvent avec des stacks coûteux, fragmentés, et souvent sous-utilisés.
La Martech : une promesse séduisante mais mal exploitée
Une explosion de l’offre
Outils d’automation, CRM avancés, plateformes de gestion de données (CDP), analytics prédictif, IA générative, chatbots… chaque année apporte son lot de nouvelles promesses.
Mais cette profusion crée un problème : les directions marketing accumulent les outils sans réelle stratégie unifiée. Selon l’étude HBR, plus de 70 % des responsables marketing reconnaissent n’utiliser qu’une fraction des capacités de leurs logiciels.
Des stacks complexes et redondants
Souvent, les entreprises bâtissent leur stack marketing tech par ajouts successifs : un CRM d’abord, un outil d’emailing ensuite, puis une CDP pour consolider les données, etc. Résultat : un patchwork difficile à intégrer.
Cette complexité entraîne :
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des doublons fonctionnels,
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une augmentation des coûts de licences,
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des problèmes d’interopérabilité entre solutions,
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un manque de visibilité globale sur la performance.
Une sous-utilisation chronique
L’étude révèle un chiffre clé : seuls 42 % des marketeurs déclarent utiliser les fonctionnalités avancées de leurs outils. Autrement dit, plus de la moitié des budgets Martech sont gaspillés dans des capacités dormantes.
Les causes sont multiples : manque de formation, turn-over élevé des équipes, absence de gouvernance, mais aussi un biais culturel : la tentation de « posséder » la dernière technologie plutôt que de maximiser l’existant.
Pourquoi la marketing tech est « cassée »
Le mythe de la solution miracle
Beaucoup d’entreprises considèrent la Martech comme une baguette magique capable de résoudre leurs problèmes structurels : manque de connaissance client, absence de stratégie claire, difficultés organisationnelles.
Mais la technologie ne peut compenser une stratégie défaillante. Comme le souligne l’HBR : « investir dans la Martech sans transformer son organisation, c’est comme installer un moteur de Formule 1 dans une voiture citadine ».
Un déficit de compétences internes
La maîtrise d’un stack martech nécessite des profils hybrides : marketeurs à l’aise avec les données, data scientists sensibles aux enjeux business, experts en intégration technique... Or ces talents sont rares et chers.
Conséquence : les entreprises achètent des solutions qu’elles ne savent pas exploiter. Selon l’étude, près de 60 % des CMO estiment que leur équipe n’a pas les compétences nécessaires pour tirer parti de leurs outils SaaS.
Une gouvernance souvent bancale
Souvent, aucun acteur n’est réellement responsable de la cohérence du stack. Les directions marketing pilotent l’achat des outils, mais la DSI en assure l’intégration, et les équipes opérationnelles les utilisent partiellement.
Ce manque de gouvernance crée des silos : chaque équipe adopte son outil préféré, sans coordination, ce qui multiplie les flux de données incohérents et fragmente la vision client.
La difficulté d’attribuer le ROI
Autre frein majeur : prouver la valeur réelle de la Martech. Les modèles d’attribution traditionnels (last click, multitouch) montrent leurs limites, et la disparition progressive des cookies tiers complique encore les choses.
Résultat : beaucoup de directions générales commencent à douter du retour sur investissement de leurs millions investis en Marketing Tech.
Quelles conséquences pour les entreprises ?
Un gaspillage budgétaire
Selon l’HBR, jusqu’à 40 % des budgets Martech seraient aujourd’hui mal investis. Cela représente des milliards de dollars annuels dilapidés en licences inutilisées ou en intégrations inachevées.
Une perte de compétitivité
Pendant que certaines entreprises gaspillent leur énergie à gérer des stacks inefficaces, leurs concurrents plus agiles exploitent à fond quelques outils bien intégrés. La mauvaise utilisation de la Martech devient donc un handicap compétitif.
Une expérience client dégradée
Lorsque les outils ne communiquent pas entre eux, les clients subissent des messages incohérents : emails redondants, offres mal ciblées, parcours clients cassés. À l’heure où la personnalisation est un levier clé, cela peut coûter cher en fidélisation.
Quelles solutions pour des outils SaaS plus efficaces ?
L’étude HBR ne se contente pas de dresser un constat pessimiste : elle propose aussi plusieurs leviers pour « réparer » la Martech et en tirer enfin de la valeur.
Recentrer la Martech sur la stratégie marketing
Avant d’acheter un nouvel outil, il faut se poser deux questions :
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Quelle stratégie client voulons-nous mettre en place ?
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Comment la technologie peut-elle servir cette stratégie ?
Autrement dit, c’est la vision marketing qui doit guider les choix Martech, et non l’inverse.
Simplifier et rationaliser le stack
Plutôt que d’empiler des solutions, les entreprises doivent auditer régulièrement leur stack pour supprimer les doublons et identifier les outils réellement utiles. L’objectif : un écosystème plus léger, plus lisible et plus facile à exploiter.
Certaines entreprises choisissent des plateformes intégrées (HubSpot, Salesforce, Adobe), d’autres préfèrent un modèle best-of-breed avec un effort fort sur l’interopérabilité. Dans tous les cas, la clé est la cohérence.
Investir dans les compétences humaines
Les outils SaaS ne créent pas de valeur sans experts capables de l’utiliser. Cela suppose de :
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Former les équipes existantes,
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Recruter des profils hybrides marketing/data,
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Développer une culture interne orientée data et expérimentation.
Mettre en place une gouvernance claire
Une direction doit être responsable de la cohérence du stack, souvent incarnée par un Chief Marketing Technologist ou une équipe dédiée à la gestion du stack.
Cette gouvernance assure :
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une vision unifiée des données,
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une meilleure communication entre DSI et marketing,
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une capacité à mesurer la performance réelle des outils.
Développer des indicateurs clairs de ROI
Pour regagner la confiance des directions générales, il est indispensable de relier les outils SaaS à des indicateurs business concrets tels que :
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réduction du coût d’acquisition client,
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augmentation du taux de conversion,
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amélioration de la fidélité,
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croissance du chiffre d’affaires.
Cela suppose d’aller au-delà des métriques purement techniques (taux d’ouverture, nombre de leads générés) pour mesurer l’impact réel sur la performance de l’entreprise.
Les tendances qui redéfinissent la Martech en 2025
Au-delà des solutions actuelles, plusieurs tendances dessinent l’avenir de la Marketing Tech :
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L’IA générative et les agents intelligents permet une production automatisée de contenus, la personnalisation en temps réel, des assistants virtuels pour les équipes marketing.
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La montée en puissance des données first-party permet une collecte responsable et transparente des données clients, pour compenser la fin des cookies tiers.
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L’unification des écosystèmes permet une émergence de plateformes capables de gérer l’intégralité du parcours client (de l’acquisition à la fidélisation).
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La Martech éthique et durable vise une intégration des enjeux de confidentialité, de sobriété numérique et de transparence.
Conclusion : de la tech à la stratégie
La Martech n’est pas condamnée. Mais elle ne peut produire de valeur que si les entreprises la replacent dans une démarche stratégique, humaine et gouvernée.
La clé n’est pas de posséder le plus grand stack possible, mais de disposer d’un écosystème simple, maîtrisé, aligné avec la stratégie marketing et porté par des équipes compétentes.
Comme le rappelle l’étude HBR : « La marketing tech n’est pas cassée parce qu’elle est inutile. Elle est cassée parce que nous avons oublié que la technologie n’est qu’un moyen, pas une fin. »
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